Pas d’indemnité de perte de fonds pour l’exploitant du domaine public – nouvelle confirmation jurisprudentielle

Jugement du 29 avril 2025 par le tribunal administratif de Toulouse Par un jugement du 29 avril 2025, le tribunal administratif de Toulouse a refusé d’homologuer une transaction octroyant une indemnité – accordée notamment pour réparer la perte d’un fonds de commerce exploité sur le domaine public en vertu d’une convention d’occupation du domaine public […]

Publié le 18/07/2025

  • Domanialité – Immobilier public

Jugement du 29 avril 2025 par le tribunal administratif de Toulouse

Par un jugement du 29 avril 2025, le tribunal administratif de Toulouse a refusé d’homologuer une transaction octroyant une indemnité – accordée notamment pour réparer la perte d’un fonds de commerce exploité sur le domaine public en vertu d’une convention d’occupation du domaine public arrivée à son terme – après avoir constaté que cette indemnité s’apparentait à une libéralité.

En l’espèce, par une convention d’occupation, la commune de Bagnères-de-Luchon a mis à disposition de la SAS Birdy, à compter du 4 avril 2016 et pour une durée de huit ans jusqu’au 30 mars 2024, les locaux d’un bar restaurant  » le Fairway  » situé dans l’enceinte du golf municipal de Luchon et lui en a confié l’exploitation.

La SAS Birdy, a demandé, avant l’expiration de la convention d’occupation, la  » régularisation d’un bail commercial  » à l’expiration de ladite convention (soit le renouvellement de la convention et sa soumission à la législation sur les baux commerciaux), chose que la commune a implicitement rejetée. Craignant les éventuelles conséquences, notamment indemnitaires, pouvant découler d’une chaine d’action contentieuses engagées par la SAS Birdy, la commune de Bagnères-de-Luchon a accepté de régler amiablement le différend l’opposant à la SAS Birdy, en recourant à une médiation, laquelle s’est dénouée par la signature d’une transaction que les parties ont voulu faire homologuer par le tribunal administratif.

Après avoir rappelé l’office du juge administratif saisi d’une demande d’homologation d’une transaction conclue sur le fondement des dispositions de l’article 2044 du code civil et L.423-1 et suivants du code des relations entre le public et l’administration – qui consiste à vérifier l’existence de concessions réciproques et équilibrées entre les parties, et, surtout, l’absence de méconnaissance d’une règle d’ordre public, telle que l’interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités (CE, 19 mars 1971, « Mergui », n°79962) – le Tribunal administratif de Toulouse constate l’appartenance des locaux litigieux mis à la disposition de la SAS Birdy au domaine public de Bagnères-de-Luchon.

De ce constat, découlent naturellement deux conséquences, rappelées avec constance par la jurisprudence administrative :

  • L’impossibilité de conclure un bail commercial sur le domaine public, lequel, en raison de la nature des droits qu’il confère à son titulaire – en particulier le droit au renouvellement du bail – est manifestement incompatible avec le caractère nécessairement personnel, précaire et révocable d’un titre d’occupation du domaine public, qui ne peut, notamment, accorder au preneur un droit acquis au renouvellement du titre d’occupation dont il est titulaire (Conseil d’État, 8ème – 3ème SSR, 24/11/2014, 352402, Publié au recueil Lebon)
  • L’impossibilité, pour les mêmes considérations d’intérêt général susévoquées, en particulier le principe de révocabilité des autorisations d’occupation du domaine public, de constituer un fonds de commerce sur le domaine public. Sur ce point, la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises a introduit dans le code général de la propriété des personnes publiques un article L. 2124-32-1, aux termes duquel «  un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l’existence d’une clientèle propre « . Toutefois ces dispositions ne sont applicables qu’aux fonds de commerce dont les exploitants occupent le domaine public en vertu de titres délivrés à compter de son entrée en vigueur (20 juin 2014). Même dans ce cas d’ailleurs l’indemnisation est au demeurant exclue lorsque la perte dudit fonds résulte de l’échéance du terme normal de la convention (Conseil d’État, 8ème – 3ème SSR, 24/11/2014, 352402, ; CAA de LYON, 4ème chambre, 16/01/2025, 23LY02298)

Faisant application de ces règles, le Tribunal administratif de Toulouse juge, en l’espèce, que l’indemnité octroyée à la SAS Birdy, en vertu de la transaction conclue avec cette dernière, pour réparer, notamment, les préjudices nés de la perte d’un fonds de commerce consécutivement au non-renouvellement d’une convention d’occupation du domaine public, et en contrepartie de la renonciation de la SAS Birdy a sollicité un bail commercial, s’apparente à une libéralité.

Par conséquent, il refuse d’homologuer la transaction dont il est saisi, laquelle méconnait ce faisant le principe – d’ordre public – de l’interdiction faite aux personnes publiques de consentir des libéralités.

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